Voici le texte de mon intervention concernant la démocratie locale, mardi 15 décembre, au Conseil de Paris.
" Monsieur le maire,
Etre démocrate, disait Jacques Derrida, ce serait agir en reconnaissant que nous ne vivons jamais dans une société assez démocratique. Servir la démocratie, c’est avoir cette conscience que l’on doit remettre son ouvrage en permanence sur le métier… En tant qu’élus, nous devons à la fois être exemplaires, mais aussi faire preuve de créativité, afin d’assurer la vitalité et la pérennité du débat démocratique. L’émergence, ces dernières années, d’une démocratie de proximité va dans ce sens. A condition bien sûr qu’elle s’inscrive dans la réaffirmation de la démocratie représentative. Seule légitime à garantir l’intérêt général. Chers collègues, l’ambition d’associer davantage les Parisiens à l’élaboration et à la prise de décision est louable. Une telle volonté contribuerait à apaiser le débat public, à renforcer le lien entre l’élu et le citoyen et à promouvoir le vouloir vivre ensemble. Notre famille politique ne peut qu’adhérer à de tels objectifs. Malheureusement, la charte participative que nous propose la majorité ne permettra pas de les atteindre. En effet, la méthode retenue par le maire de Paris et son adjoint en charge de la démocratie locale est à l’opposé des principes dont votre majorité se gargarise en matière de démocratie. Le premier principe aurait été de respecter l’opposition. Lorsque l’on parle de démocratie, cela parait évident. Et bien à Paris, il en va autrement puisque aucune concertation avec les groupes de l’opposition n’a été voulue. Cela en est même devenu cocasse puisque après nous avoir posé un lapin en mai dernier, Monsieur Bouakkaz a bien voulu rendre visite aux groupes de l’opposition, mais après avoir fini d’écrire son projet. Pour illustrer la vitalité démocratique de Paris, le respect de l’opposition et l’envie de débattre, vous conviendrez qu’il était difficile de faire pire. De même, il aurait été judicieux de la part de l’exécutif de mettre en place, lors de ce conseil de Paris, un débat organisé sur le sujet. Et bien de débat il n’y en aura pas. La majorité fait passer ce texte en catimini comme si elle ne l’assumait pas. Pourtant, on peut reprocher beaucoup de choses au maire de Paris mais pas celle de ne savoir communiquer. Il ne communique pas sur ce texte parce qu’il le sait aussi plat que le débat d’idées au parti socialiste. Il faut dire que cette charte montre que votre majorité est en manque d’imagination. Promis dès le début de votre seconde mandature, il vous aura fallu 18 mois pour écrire ce document de 7 pages. Si ce n’est pas la preuve d’un début d’usure de votre majorité, c’est en tout cas l’illustration des prémisses d’un épuisement… A l’image de la démocratie locale parisienne… En effet, que constatons nous après 9 ans de mandat de votre majorité ? Un triple échec. Echec, tout d’abord, au regard du principe d’universalité. Vous n’avez réussi à intéresser à la démocratie locale qu’une minorité infime de Parisiens. Echec, ensuite, sur le pluralisme. La démocratie locale, cela commence par le respect des élus et des droits de l’opposition. Echec, enfin sur la transparence des décisions et sur l’écoute des citoyens. Les exemples foisonnent de projets pour lesquels l’exécutif municipal n’a traité que par le mépris les recommandations des structures associatives et participatives. La charte qui nous est proposée, n’est que parole et parole pour reprendre la chanson de Dalida.. Chers collègues, si l’opposition se doit de dénoncer les erreurs de la majorité, elle se doit surtout faire œuvre de proposition. C’est dans cet esprit que mon groupe, notamment à l’initiative de Marie-Claire Carrère-Gée, vous propose d’adopter, via l’amendement 76, une contre charte. Cette contre charte se veut avant tout pragmatique. Elle réaffirme la légitimité de la démocratie représentative. Car la démocratie locale ne doit pas servir de rampe de lancement à un poujadisme participatif. Notre projet veut également mettre fin à une véritable « théodulisation » du débat local voulu par votre majorité. Alors qu’existent à Paris 121 Conseils de quartiers, un Conseil de la citoyenneté des parisiens non communautaires, un Conseil de la vie étudiante, et dans chaque arrondissement un CICA pour les associations, un Conseil de jeunesse et parfois un Conseil d’anciens, des Conseils de sages et des Conseils d’enfants…, l’exécutif parisien veut encore n accroître le nombre. Et cela selon une équation simple : 1 Parisien = 1 problème = 1 comité. Créant ainsi l’émergence d’une démocratie plus bancale que locale. Pour contourner les conseils d’arrondissement et les conseils de quartier qui s’honorent de ne pas toujours être à la botte de la municipalité, vous leur créez de la concurrence. En multipliant les structures, on dilue la démocratie locale pour, au final, pouvoir mieux décider tout seul. Enfin, pour en finir avec une démocratie locale réservée à un cercle d’initiés, notre ambition est de renforcer le poids des Parisiens dans le débat public. Avec comme principe de base : 1 électeur = 1 voix, nous voulons ainsi instaurer des référendums locaux. Ils pourraient être le fer de lance d’une nouvelle démocratie urbaine, digne du 21ème siècle, pour permettre aux Parisiens de maîtriser le destin de leur Ville sur de grands projets structurants. Ainsi chers collègues, nous voulons promouvoir une démocratie sans doute moins « participative », mais avec plus de participants et des participants écoutés. "