Voici le texte de mon intervention, lors du conseil d’arrondissement du mardi 18 novembre, sur l’adoption de la nouvelle charte des conseils de quartier du 4ème arrondissement.
« Chers collègues,
La démocratie locale est un sujet déterminant pour la vie de nos quartiers.
Elle mérite vigilance et soutien.
Vigilance parce qu’elle ne doit pas apparaître comme un moyen détourné pour bafouer la démocratie représentative. Seule légitime, à nos yeux, pour exprimer la volonté commune et pour désigner celles et ceux qui auront l’honneur d’en être ses serviteurs.
Démocratie représentative à laquelle nous sommes, je pense, tous collectivement très attachés.
Soutien parce que bien organisée, la démocratie locale peut être une source complémentaire d’expression de la citoyenneté, un lieu d’échanges constructifs et d’informations pour tous les habitants de l’arrondissement.
Incontestablement, la charte des conseils de quartiers, qui nous est présentée ce soir, va dans ce sens. Le projet a pour ambition d’encourager le volontariat à la démocratie locale.
Soit de manière indirecte en le suscitant par un tirage au sort d’habitants sur la liste électorale, soit directement en tirant au sort des personnes volontaires. Cette évolution vers le volontariat me semble aller dans le bon sens. Elle permet de corriger un système aussi verrouillé que replié sur lui-même.
Elle pourrait même me faire oublier, l’espace d’un instant, que vous supprimez un droit de nomination pour l’opposition dans les conseils de quartiers en faisant disparaître le collège politique.
A propos de ce droit supprimé, vous pourriez, et vous en avez sans doute la tentation, me rétorquer qu’il en est de même pour la majorité.
Ce qui est vrai puisque ce collège n’existe plus, ce qui est faux quant à l’esprit de cette charte puisque les bureaux des conseils de quartiers seront ouverts en permanence aux membres de l’exécutif municipal (cf art 18 & 24) et seront fermés avec constance aux membres de l’opposition.
Ce qui prouve que la majorité peut faire preuve d’habilité politique mais cela nous n’en doutions pas.
Pour en revenir à l’essentiel, le mode de désignation des membres des conseils de quartier nous convient.
Dans le même esprit, nous approuvons l’idée que des ressortissants communautaires comme non communautaires puissent être des acteurs de la démocratie locale.
Simplement, il nous faudra être vigilants sur la désignation des non communautaires puisqu’à l’inverse des ressortissants de l’Union européenne ils ne sont sur aucune liste électorale.
Notre conception exigeante de la citoyenneté ne remet pas en cause cette indispensable ouverture à tous de la vie de nos quartiers.
Vous l’avez dit Monsieur Landel, l’opposition a été consultée. Mais a-t-elle été entendue ?
Lorsque nous nous sommes rencontrés, les élus de l’UMP et du Nouveau Centre vous ont fait part de nombreux amendements au projet qui leur était soumis. A l’époque, il s’agissait d’un document de travail. Ce soir, nous devons nous prononcer sur une version, visiblement définitive.
L’opposition vous avait fait des propositions pour améliorer votre texte en vous les communiquant autour de quatre exigences :
Plus de transparence, un fonctionnement plus efficace, une meilleure communication et enfin des droits reconnus à l’opposition.
1) Concernant la transparence :
Nous vous avions demandé de la garantir quant à la désignation des membres des bureaux des conseils de quartiers en général, du tirage au sort ad hoc en particulier.
C’est donc avec satisfaction que nous notons que le tirage au sort sera public et en présence de l’ensemble des élus de l’arrondissement. (Art 11)
2) Concernant un fonctionnement plus efficace :
- L’opposition a été écoutée sur la nécessité de préciser la définition des conseils de rue dans le préambule de la charte.
- De même que nous apprécions qu’en matière d’application de la parité, la charte qui nous est soumise soit plus exigeante que la première version. (article 10)
- Cependant une contradiction majeure demeure. Elle concerne l’article 3 et le reste de la charte. L’article 3 stipule que « chaque habitant et/ou toute personne participant à la vitalité locale du 4ème arrondissement dans le cadre de ses activités professionnelles est d’emblée conseiller de quartier ».
A la lecture de la charte, la réalité est tout autre. Ce n’est pas la charte des conseils de quartiers qui nous est proposée ce soir, mais la charte des bureaux de conseils de quartier.
La nuance est très importante. Cette démocratie locale est corsetée, restreinte pas assez ambitieuse. Elle va être la propriété d’un petit nombre. Cela ne va pas le sens d’une démocratie que vous souhaitez plus participative. En appliquant cette charte, vous aurez un cercle d’initiés d’un côté et peu de participants de l’autre.
3) Notre 3ème exigence a pour objectif d’améliorer l’information du public :
A la demande de l’opposition, l’article 30 relatif à l’information de la population a été complété. Je me réjouis de voir que de vrais efforts devront être mis en place : site internet (qui, au passage, ne peut que s’améliorer), multiplication des panneaux sur les lieux publics… Sur ce sujet, nous serons particulièrement vigilants.
Enfin, concernant les droits de l’opposition
Tout est dit dans l’article 18 :
Je décerne d’ailleurs à son auteur à la fois la palme du verrouillage et le prix de l’humour.
La palme du verrouillage pour avoir écrit : « Le Maire de l’arrondissement, ou son représentant, et/ou les élus en charge de la démocratie participative peuvent assister aux réunions, à la demande du bureau ou de leur propre initiative. » Rien de plus normal, me direz vous, simplement pourquoi cette possibilité n’est pas offerte au moins à un membre de l’opposition.
Quant au prix de l’humour, nous lui décernons pour avoir mentionné que « Tout élu peut participer aux réunions publiques organisées par les bureaux des conseils ».
Je ne savais pas qu’il y avait des réunions publiques qui pouvaient être fermées aux élus. Si vous connaissez une commune où les choses se passent ainsi, il est urgent de la dénoncer.
Mais si je suis ironique, je ne suis pas injuste, je crois, je suis même certain que l’ajout de cette phase partait d’un bon sentiment, celui de vouloir permettre aux élus de l’opposition d’être associés à l’organisation de la démocratie locale.
Malheureusement, le résultat est tout autre.
Il y a un particularisme parisien préoccupant. Alors que je peux siéger dans de nombreux organismes publics, il m’est interdit de siéger dans les bureaux des conseils de quartier d’un arrondissement dont je suis l’élu. C’est une originalité que je dénonce.
Dans la République, il n’y aucun lieu où l’opposition n’a pas un droit de regard que cela soit à l’échelle d’un pays ou d’un quartier. Il n’y a pas une assemblée, une commission, une collectivité publique, un organisme public où majorité et opposition ne siègent pas de concert…
Sauf visiblement dans les bureaux des conseils de quartiers de notre arrondissement.
A cela s’ajoute l’article 24 qui montre que la majorité peut également avoir la main mise sur l’ordre du jour.
L’opposition est tellement attachée à la démocratie locale, qu’elle souhaiterait y être pleinement associé… A notre grand regret, nous sommes loin du compte.
A la question, l’opposition a–t-elle été entendue ?
La réponse n’est pas assez, c’est pourquoi nous nous abstiendrons. »