« Monsieur le Maire,
Chers collègues,
Lorsque l’on parle de solidarité, nous devons en tant qu’élus faire preuve d’humilité et de retenue. Car derrière les mots, il y a des hommes et des femmes qui souffrent, des familles en difficulté et des êtres injustement fragilisés.
A regret votre communication tant sur le fond que sur la forme ne répond pas à ces exigences de modestie tant elle tourne à l’autosatisfaction et à la critique facile.
A vous entendre, tout est de la faute du gouvernement.
Il serait, à vous écouter, responsable de la crise.
Une crise pourtant mondiale.
Une crise de l’endettement et de la régulation à l’échelle planétaire.
Une crise « impensable » pour reprendre l’expression de l’économiste Matthieu Pigasse, peu suspect de sarkophilie….
Et face à cette situation hors norme, j’allais dire historique…
Ce matin, vous argumentez autour de la solidarité pour nous faire la leçon et pour rendre le gouvernement géniteur de tous les maux sociaux.
Dois-je vous rappeler que la solidarité constitue un des piliers de notre pacte républicain.
Vous n’en êtes pas le propriétaire, vous devez en tant que Maire de Paris en être le garant. La solidarité ne peut se contenter d’être seulement des mots, elle doit être avant tout des actes.
Des actes alliant humanisme et efficacité.
Des actes à l’image de mesures comme le SAMU social crée par Jacques Chirac.
Des actes concrets comme le RSA.
Ce dispositif la gauche française en a rêvé, Nicolas Sarkozy l’a réalisé.
Le RSA que vous allez appliquer, ce dont nous pouvons que nous feliciter.
A l’inverse d’une partie de votre majorité, je n’aborde pas ce débat sur la solidarité avec une approche manichéenne.
Il y a dans votre communication des décisions qui vont dans le bon sens.
- Oui, à une culture d’évaluation en matière de politique sociale.
- Oui, à une nouvelle école de la seconde chance.
- Oui, à plus de bénévolat et de volontariat dans le domaine social.
Mais malheureusement au-delà de ces propositions de bon sens, votre politique de solidarité illustre une fois de plus votre choix de bâtir le Paris des plus aisés et des plus aidés. Les premiers auraient, grâce à vous, bonne conscience, les seconds seraient vos obligés.
Si je salue certaines de vos décisions pour les plus démunis, je considère qu’il serait trop simpliste de limiter la solidarité aux publics les plus en difficulté. Leur venir en aide est une exigence morale. Mais il en est une autre tout aussi fondamentale de garantir la mixité sociale.
Et c’est sur ce sujet que votre politique sociale manque d’ambition. Elle ne correspond pas au Paris de la réalité. Aux Paris des classes moyennes.
Chers collègues, « La « classe moyenne » est un idéal » pour reprendre l’expression de François Fillon.
L’idéal de vivre de son travail.
L’idéal de laisser quelque chose à ses enfants.
L’idéal de voir ses enfants réussir, sinon mieux, du moins aussi bien que soi-même.
Cette espérance est l’ambition du Paris des artisans, autant que celui des enseignants, des infirmières et des sages femmes, des salariés, des employés, des jeunes consultants… Ce Paris qui travaille.
Ce Paris qui peut-être aussi celui des accidentés de la vie :
- Le Paris des couples qui divorcent
- Le Paris des salariés qui perdent leur emploi.
Ce Paris là, celui des classes moyennes vous vous en désolidarisez.
D’abord par votre politique fiscale, alors que le gouvernement baisse les impôts principalement pour les revenus dits moyens vous généralisez le matraquage fiscal sur Paris.
Ensuite par votre politique du logement dont les classes moyennes ne sont pas la priorité.
Il est symboliquement fort, Monsieur le Maire, et sans doute politiquement habile de fanfaronner pour la création de 5 appartements PLAI sur l’Ile Saint-Louis dans le 4ème, mais il est aussi symbolique et bien préoccupant de voir dans ce même arrondissement, une école centenaire, celle de la rue François Miron fermer ses portes.
Si cette école a fermé, c’est que dès le 2ème enfant les familles quittent l’arrondissement et souvent Paris pour ce loger.
Ce double constat relatif au 4ème arrondissement montre que votre approche de la mixité sociale est caricaturale. La mixité sociale républicaine, dont je suis un ardent défenseur, n’est pas de se limiter à permettre aux plus pauvres de côtoyer les plus riches. Dans notre conception de la mixité sociale, un couple d’enseignants doit aussi pouvoir, à la naissance d’un deuxième enfant, rester habiter dans le 4ème arrondissement ou tout autre arrondissement de son choix. Ce n’est désormais plus le cas.
Parce qu’il n’y a pas assez de logement intermédiaires à Paris.
Parce que l’accès à la propriété était déjà avant la crise un vrai parcours du combattant et qu’avec la crise il est devenu une mission quasi impossible.
Enfin, votre politique de l’emploi devait avoir pour fondement le milliard de Monsieur MISSIKA. En effet quoi de mieux pour générer de l’emploi sur le long terme que faire de Paris la ville de l’imagination, d’en faire la capitale attractive du 21ème siècle… Le hic c’est que le milliard de Monsieur MISSIKA sera le Godot de votre second mandat… On va l’attendre, on va l’attendre…. Et comme le personnage de Becket, il ne viendra pas.
Monsieur le Maire, une récente étude du CREDOC mentionnait qu’au niveau national, il n’y avait pas de paupérisation des classes moyennes.
En est-il de même à Paris ?
On ne peut sans doute pas parler encore de paupérisation mais par votre inaction les classes moyennes sont aux frontières d’une précarisation nouvelle. Il est temps de réagir. Il est temps d’être solidaire pour tous. »