Au 22-24 de la rue des archives, on trouve le dernier cloître médiéval de Paris. Un ensemble religieux avait été construit dans cette partie du 4e arrondissement suite à un fait qui rappelle combien l’antisémitisme sévissait au Moyen-Âge.
En effet, d’après la tradition, cet endroit était le lieu où se trouvait la maison d’un juif nommé Jonathas et qui était usurier. En 1290, une femme qui lui avait déposé en gage ses vêtements pour obtenir de l’argent ne put rembourser sa dette. Jonathas fut accusé d’avoir accepté de rendre les habits en échange d’une hostie que la pauvre personne aurait due rapporter après avoir assister à la messe en l’Eglise Saint-Merri le jour de Pâques. L’histoire est ensuite assez classique : Jonathas aurait tenté de percer l’hostie de plusieurs coups de canifs. Aussitôt un sang abondant se serait mis à couler à grand flot. Ne sachant que faire, Jonathas aurait jeté l’hostie dans une chaudière d’eau bouillante. Celle-ci devint aussitôt rouge comme du sang alors que l’hostie s’élevait au-dessus d’elle. Le quartier fut ameuté. Jonathas fut arrêté et brûlé vif tout près de là, en place de grève (place de l’Hôtel de Ville). Voilà donc une histoire qui rappelle que la communauté juive était présente dans cette partie de Paris dès le Moyen Âge. Elle était victime de préjugés qui se sont renforcés au XIIIe siècle comme le montre les édits pris par Louis IX dans les années 1250.
A la fin du XIVe siècle, pendant le règne de Charles VI, cela conduisit à la décision d’expulser tous les Juifs hors du royaume de France. Les biens de Jonathas furent confisqués au profit du roi Philippe IV le bel qui fit construire sur son emplacement une chapelle expiatoire. Il y établit « l’ordre des frères de la charité » qui y restèrent jusqu’au XVIIe siècle. En 1633, les bâtiments furent repris par l’ordre des « carmes billettes » qui sont à l’origine du nom actuel de ce lieu.
Le cloître des billettes tel qu’on le voit aujourd’hui a été construit dans la 1ère moitié du XVe siècle. C’est un bel exemple de gothique, assez dépouillé, alors que le siècle est normalement caractérisé par un style flamboyant parfois un peu exubérant. A côté, on trouve l’église qui a été complètement reconstruite au milieu du XVIIIe siècle par l’architecte dominicain, le frère Claude. Elle est un bel exemple de construction en style néo-classique. L’ensemble formé par le cloître et l’église a donc une certaine harmonie malgré deux époques de construction très différentes.
Après avoir été fermé au culte pendant la Révolution française, l’empereur Napoléon Ier a installé en ce lieu, en 1808, le consistoire de l’Eglise luthérienne de France. On y trouve aujourd’hui le centre culturel luthérien. Le cloître accueille régulièrement des expositions qui permettent de le visiter. L’église est un lieu de cérémonie religieuse de l’église évangéliste. Elle accueille régulièrement des concerts. Un magnifique orgue a été installé dans les années 1980.
Le « + » pour les riverains : Il est possible de louer, notamment pour des réunions, une des salles situées dans les étages à droite de l’entrée principale.
Emmanuel DELARUE
Pour en savoir plus :
- Jacques HILLAIRET, Connaissance du Vieux Paris, Editions Princesse, 1956 (nombreuses rééditions)
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