Pendant longtemps, quai de l'Hôtel de ville, une grande statue située devant l'Hôtel de ville était cachée de la vue par les arbres. La tempête de 1999 a eu au moins un mérite : celui de pouvoir admirer, depuis la Seine, Etienne Marcel à cheval. Cela permet d'évoquer la triste histoire d'un dirigeant de la ville de Paris qui rêvait d'un destin national...
Il faut tout d'abord rappeler qui était Etienne Marcel. Ce personnage né au début du XIVe siècle a occupé à partir de 1354 la fonction de "prévôt des marchands" (l'équivalent actuel du maire). Les temps étaient durs puisque la Grande Peste avait ravagé Paris quelques années plus tôt et que la France était en guerre avec l'Angleterre. (C'est la "guerre de 100 ans" déjà évoquée par Avishaï dans son article sur la Bastille).
Lors de la bataille de Poitiers (1356), le roi Jean II est fait prisonnier sur le champ de bataille. Il est envoyé à Londres et une rançon est demandée aux Français. La situation devient de plus en plus difficile. Le dirigeant provisoire est le jeune fils du roi, le Dauphin Charles. A Paris, Etienne Marcel joue un rôle prépondérant dans les Etats généraux réunis pour collecter l'argent nécessaire.
En février 1358, une véritable révolte urbaine éclate à Paris. Etienne Marcel, n'hésitant pas à louvoyer entre les différentes factions - voire à pactiser avec l'ennemi - et s'appuyant sur la foule tente d'imposer son autorité au Dauphin. Cela se finit fort mal pour lui : après avoir été adulé pendant des années par la population de Paris, le prévôt des marchands est sur le point de prendre la fuite quand il est surpris près des portes de Paris le 31 juillet 1358 : il est massacré par la foule.
Cette statue, oubliant la triste fin d'Etienne Marcel, a été érigée à cet endroit suite à un concours de 1882. L'artiste choisi était le Toulousain Jean-Antoine Idrac. Il n'a pas pu finir son oeuvre car il est mort de la typhoïde en 1883. Le cheval est donc dû à un autre Toulousain : Laurent Marquestre. Le monument en bronze de 4700 Kg a été inauguré le 15 juin 1888.
La municipalité voulait par cette statue protester contre la décision de laisser la municipalité de Paris sous la tutelle du préfet. Le gouvernement républicain ne souhaitait pas risquer de revivre les débordements révolutionnaires de la Commune de 1871. (Il faudra en effet attendre 1977 pour que les Parisiens puissent élire un maire en la personne de Jacques Chirac). Ironie de l'histoire, le gouvernement de l'époque refusa d'assister à l'inauguration, et c'est le célèbre préfet Poubelle (celui qui a donné son nom à cet objet fort utile pour la propreté des rues) qui inaugura la statue devant un grand nombre de maires invités pour la circonstance...
A lire : Georges POISSON, Guide des statues de Paris, Monuments, décors, fontaines, Hazan Les guides visuels, 1990.
Tiens, c'est drôle, cette histoire me rappelle beaucoup quelqu'un... A qui je ne souhaite pas la même fin.
Rédigé par : François T. | 13 janvier 2008 à 15:54
Etienne Marcel était un démagogue qui n'a pas hésité à pactiser avec l'ennemi pour assurer son pouvoir contre le Roi. C'est pourquoi je pense que cette statue mériterait de finir sa vie au plus tôt : ça se recycle bien le bronze ?
Rédigé par : Lionel | 15 janvier 2008 à 20:58
Point trop d'excès Lionel ! Cette statue est un des plus beaux exemples de statue équestre dans Paris. De plus, Etienne Marcel reste un symbole, certes discutable, de cette position très ambiguë d'un Paris qui tout en étant la capitale n'a pas du tout joui des mêmes libertés muncipales que les autres villes et village de France.
Rédigé par : Emmanuel | 16 janvier 2008 à 18:25